"Je veux décrire l’Eglise –
mon Eglise, qui naît avec moi,
mais ne meurt pas avec moi – et moi non plus je ne meurs pas avec elle,
celle qui me dépasse constamment –
L’Eglise : le fond de mon être et son sommet.
L’Eglise – la racine, que je plonge dans le passé
et l’avenir à la fois,
le Sacrement de ma vie en Dieu,
qui est Père.
Je veux décrire l’Eglise –
mon Eglise, qui s’en liée à ma terre
(il lui a été dit, « tout ce que vous lierez sur la terre,
sera lié dans le ciel ») –
alors elle s’est liée à ma terre mon Eglise.
cette terre est située à l’estuaire de la Vistule,
ses affluents grossissent au printemps, lorsque fondent les neiges
dans les Carpates.
L’Eglise s’est liée à ma terre,
pour que tout ce qui est liée sur elle,
soit liée dans le ciel.
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(première strophe d'un poème épique que Charles Wojtyła a composé pour la fête de Saint Stanisłas, le patron de la Pologne.
lorsqu'il écrivit cette tirade sur "mon Eglise", le futur Saint Jean Paul deux ne savait peut être pas qu'il serait élu pape moins d'un an après, en 1978.
bon, effectivement, on raconte qu'il avait sûrement déjà entendu cela de la bouche de Saint Pio.
mais toutes les références poétiques au dégel (en
russe glasnost) sont de lui seul...
évidement comme pour tout texte publié sous le régime de censure préalable (la norme en
pays communiste) il faut déchiffrer laborieusement tous les sous entendus.
(Vous avez pu le constater avec la chanson a priori
innocente que j'ai récemment traduite sur youtube.)
alors je ne vais pas avoir la prétention de faire ici un travail qu'on donnerai
en Pologne en exercice au baccalauréat
et ce dans les filières les plus sélectives.
mais il suffit de savoir, pour se donner la mesure de l'idée que mgr Wojtyła se donnait de
sa mission, qu'à l'époque il était archevêque titulaire du siège de Cracovie, qui donc avait
été celui de Saint Stanislas, justement
et que ce saint mourut en martyr pour s'être opposé au pouvoir politique
une sorte de Saint Thomas More local.
le rapprochement avec le devenir de Saint Jean Paul deux et trop évident
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alors poussons les recherches plus loin.
quand on cherche, on trouve que le martyr de Saint Stanislas (que nous fêtons aujourd'hui.)
fit l'objet d'une note à la fin de l'article "Pologne" de l'encyclopédie de Diderot et d'Alembert...
pourquoi intéresse-t-il ces philosophes ?
en plus de s'opposer au pouvoir despotique (comme eux mais avec des siècles d'avance
sur les lumières françaises) Saint Stanislas fit l'objet après sa mort d'un souvenir spécial :
chaque nouveau roi de Pologne, au moment de son couronnement
par l’évêque de Cracovie, devait demander "pardon" à genoux pour
ce meurtre originel,
comme s'il était celui qui avait lâchement fait assassiner ce Saint Stanislas en pleine messe.
alors même qu'un roi élu, selon les coutumes de la Pologne après le seizième siècle, n'avait
en général aucun lien de parenté avec l'auteur du crime.
pour les encyclopédistes, c'était une grande preuve de la
reconnaissance de la supériorité du droit par rapport à l'arbitraire
et de la Pologne de l'époque par rapport à la France de l'époque,
par cette occasion.
les encyclopédistes proposaient même de s'en inspirer...
(bon pour la deuxième fois, après l'article sur l'humoriste, je n'ai plus la place d'insérer
la version polonaise du poème en plus de ma traduction.)
pourquoi j'ai mis cette illustration ?
alors c'est tout simple. maintenant que les neiges ont fondu relisez lentement ce poème
et essayez d'avoir un peu l'état d'esprit de monseigneur
Wojtyła quand il pensait au martyr,
la joie...
quand on Vous persécutes fermez les yeux et pensez à la
Pologne.)